Voilà le mois de juillet arrivé. Il fait beau, il fait chaud et vous profitez du beau temps sous l'ombre de vos arbres et arbustes préférés. Vous contemplez leur splendeur, mais soudainement, quelque chose d'anormal capte votre attention. Les feuilles sont criblées de trous, squelettées et il semblerait même qu'elles aient été grignotées par des insectes. Vous gardez un œil attentif sur la situation, mais celle-ci empire de jour en jour. Et puis soudainement, vous apercevez enfin les coupables sur une feuille, attroupé en petit groupe. Les redoutables scarabées japonais (Popillia japonica) sont arrivés dans votre cour. Cette espèce, qui s'est introduite sur le continent en 1916, à travers des plantes horticoles contaminées, est toujours présente pour vous hanter 100 ans plus tard. Mais soyez sans crainte, il existe plusieurs solutions et votre niveau de succès passera par votre niveau de connaissance de ce parasite. Préparez-vous donc pour un cours 101 sur les scarabées japonais. Mais tenez-vous pour averti, nous vous y proposerons peut-être des conseils que vous ne souhaitez pas entendre. Avez-vous le courage de changer vos habitudes?
Que faire? Tout d'abord, il faut prendre le temps de bien comprendre le cycle de vie de ces insectes, car tenter d'intervenir avec une solution miracle, sur un seul front, serait assurément un combat perdu d'avance. Cela dit, avec une bonne compréhension de leurs habitudes, leurs besoins et leurs préférences, vous pourrez aisément mettre en place plusieurs mesures pour rendre vos jardins beaucoup moins propices à leur développement. Et plus vous appliquerez de mesures différentes pour combattre le problème, le meilleur seront vos chances de succès. Mais soyez rassuré! Bien que certaines solutions peuvent représenter un sacrifice du jardin idéal pour certains, la plupart de ces solutions sont simples à implémenter et peu couteuses. Je vous invite donc à prendre le temps de lire ce texte en entier pour préparer votre arsenal contre ces envahisseurs. Après tout, si vous êtes assez attentif pour avoir remarqué, identifié et recherché ce parasite, vous avez probablement déjà investi des sommes importantes d'argent, d'efforts et/ou de temps dans la croissance de vos végétaux. Prendre quelques minutes de plus pour mieux comprendre ce prédateur, c'est simplement du temps bien investi vers le bien-être de vos plantes, arbres et arbustes.
Pourquoi vous? Vous remarquez peut-être que votre famille et vos amis ne semblent pas ou peu infligé de ce problème. Que ce passe-t-il qui fait de vos arbres la proie de ces bestioles? Tristement, c'est probablement que vous et/ou vos voisins avez de beaux jardins bien soignés. Bien que les scarabées japonais soient une espèce très envahissante, c'est un problème qui afflige presque exclusivement les arbres et arbustes en milieu urbain. Cela s'explique par la présence de plusieurs facteurs contributifs, que l'on retrouve principalement en ville, et nécessaire pour mener à bien leur cycle de vie. Ce cycle passe par quatre stades: œuf, larve, pupe et adulte. Si votre propriété et celles de vos voisins offrent tous les éléments essentiels pour compléter ce cycle, la population de cet insecte sera largement exacerbée et les dommages à vos arbres seront assurés. Inversement, si ces facteurs sont absents, l'insecte sera beaucoup plus rare et les dommages presque indétectables.
Cycle de vie
Les œufs
Au mois d'aout, les adultes femelles pondent une soixantaine d'œufs chacune, préférablement dans les sols qui offrent la meilleure nourriture pour supporter leur progéniture. Et la meilleure nourriture n’est nul autre qu'une graminée qui semble absolument indissociable des milieux urbains: le vénéré gazon. C'est d'ailleurs ce qui explique largement la rareté de cet insecte dans les secteurs très boisés ou les gazons sont presque totalement absents. Pas de gazon, pas de scarabées japonais... ou presque. Mais bon! Le but de l'article n'est pas de vous convaincre d'éliminer votre gazon au profit du trèfle blanc qui aura le bénéfice de fixer l'azote pour fertiliser votre sol, ou encore du thym qui parfume l'air et se maintien à une hauteur raisonnable sans devoir être taillé toutes les semaines, ou même d'un jardin rempli d'une panoplie de plantes variées et bénéfiques à la rhizosphère. Cela dit, si vous songiez déjà à varier un peu la recette de la cour parfaite, il y a là l'opportunité de faire une pierre deux coups en défiant les normes d'esthétisme paysager.
Les larves
Une fois les œufs éclos, les larves restent dans le sol pour se nourrir des racines du gazon, et ce, jusqu'au mois d'octobre environ. Lorsque les journées refroidiront, elles migreront ensuite plus profondément dans le sol (15 à 30cm) pour y passer l'hiver, bien protégé. Une fois les temps doux de retour, vers le début avril, elles retournent se nourrir des racines à la surface, jusqu'à ce quelle ce transforme en pupes.
Les pupes
Les larves se transforment généralement en pupe vers le mois de juin. Ce stade est en fait simplement transitoire pour les préparer à leur émergence en tant qu'adulte, entre la fin juin et le début juillet.
Les adultes (scarabée) La fin juin signale malheureusement le début de l'infestation visible. Si vous êtes chanceux, vous n'observerez que quelques dommages sur les feuilles, en trouvant difficilement le parasite qui en est responsable. Mais si vous faite partie des plus affectée, votre cour aura des airs d'infestation qui aurait pu servir d'inspiration pour le film "La Momie" circa 1999. Et bien que ce soit les larves qui causent le plus de dommages au gazon, ce sont les adultes grégaires qui feront des ravages sur les feuilles, les fleurs et les fruits.
Des solutions
Contrôle mécanique
Pour cette solution, un seau d'eau savonneuse et un peu de patience le matin sont tout ce qu'il vous faut. Si vous êtes du type matinal, voilà l'occasion de visiter vos jardins alors que les scarabées sont encore ankylosés de la nuit froide. Ceux-ci seront maladroits et quelques mouvements vigoureux des branches sur lesquelles elles reposent suffiront à les faire tomber dans votre piège. Ça ne règlera pas l'entièreté du problème, mais dans l'immédiat, c'est un bon départ et si c'est fait très tôt, les individus retirés ne pourront pas dégager les phéromones qui auraient autrement attiré davantage de scarabées.
Contrôle biologique
Il existe principalement deux méthodes pour le contrôle biologique: les nématodes (Neoaplectana carpocapsae et Heterorhabditis heliothidis) ainsi que la bactérie Bacillus thuringiensis var. kurstaki, plus connue sous le nom de BTK. Ces deux agents biologiques se trouvent à infecter les larves en leur nuisant suffisamment pour diminuer drastiquement le niveau d'infestation, localement. C'est-à-dire que si vous appliquez ces solutions chez vous, cela n'empêchera pas les larves de la cour voisine de devenir des scarabées et sauter votre clôture pour venir infester vos végétaux une fois le traitement terminé. Par ailleurs, ces deux agents ont aussi une efficacité limitée dans le temps puisque ce ne sont pas des organismes qui se maintiendront naturellement dans votre jardin d'une année à l'autre. Il faut généralement les appliquer sur plusieurs années pour constater les résultats souhaités.
ATTENTION: Même si ce sont des agents biologiques, certaines précautions s'imposent lors de leur utilisation. De plus, les lois provinciales et/ou des règlements municipaux peuvent en avoir restreint l'utilisation au moment de votre lecture de ces recommandations. Il est de votre responsabilité de vous assurer dans faire une utilisation appropriée, sécuritaire et conforme à la loi.
Contrôle chimique
Cet article ne serait pas honnête s’il ne fessait pas mention du mot en "p". Ce mot que personne ne veut prononcer par peur d'être flagellé sur la place publique ou d'obtenir le stigma d'ennemie de la nature, a pourtant sa place dans bien des applications et pour le bien de la nature. Ceci dit, rares sont les infestations de scarabées japonais qui en justifient l'utilisation, car l'impact négatif écologique de ces produits et leur niveau de risque pour la santé lors d'une mauvaise application outrepassent très fréquemment les bénéfices esthétiques que l'élimination du parasite peut offrir. Et malheureusement, ces produits semblent, la plupart du temps, attirer des utilisateurs qui s'en remettent à 100% pour contrôler les parasites; toujours en quête d'un produit plus puissant et ignorant tous les autres méthodes de contrôle à leur disposition. Ces produits ne sont donc pas mauvais pour l'environnement en soi, mais leur utilisation déraisonnable dans les milieux urbains l'est très certainement.
Maintenant que vous comprenez un peu mieux notre position sur le sujet, permettez-moi de parler des pesticides (oui, je l'ai dit) avec honnêteté et transparence. Il existe des pesticides par application vaporisée, qui sont relativement efficaces pour éliminer les scarabées, mais qui peuvent aussi nuire à plusieurs autres insectes bénéfiques (insectes qui contrôlent d'autres parasites) dans le feuillage de vos arbres et arbuste, provoquant ainsi un risque de débalancement qui pourrait laisser place à une infestation de parasites différents. De plus, ils sont aussi très risqués pour votre santé et celles des autres organismes qui y sont vulnérables sans toutefois nuire à vos végétaux. Pour ces raisons, la plupart ne sont pas homologués pour l'utilisation en culture ornementale résidentielle au Québec. Toutefois, le traitement du gazon contre les larves est généralement efficace pour diminuer considérablement la population de ce parasite. Puisque l'insecte ne fait normalement qu'un cycle par année, des traitements de gazon au bon moment peuvent s'avérer très efficaces pour "briser" ce cycle. Un tel traitement n'éliminera pas les scarabées adultes si vous prenez subitement conscience du problème au milieu du mois de juillet, mais il peut aider à diminuer la population d'adultes l'année suivante.
Attention: À noter que ce genre de traitement devrait être secondaire aux autres traitements biologiques disponibles et devrait toujours être utilisé en combinaison à d'autres méthodes et si nécessaire seulement. De plus, certaines précautions s'imposent lors de leur utilisation. Les lois provinciales et/ou des règlements municipaux peuvent en avoir restreint l'utilisation au moment de votre lecture de ces recommandations. Il est de votre responsabilité de vous assurer dans faire une utilisation appropriée, sécuritaire et conforme à la loi.
Contrôle culturale
Les scarabées japonais ne sont pas parasitaires de toutes les espèces de plantes, d'arbre et d'arbustes. Si vous observez que d'une année à l'autre, malgré vos efforts, le problème persiste, il serait peut-être souhaitable de retirer les plantes qui les attirent le plus pour les remplacer par des plantes qu'ils détestent. Si la gastronomie n'est plus à leur gout, la population se relocalisera dans un secteur où la nourriture leur semble plus convenable. Vous trouverez ici une liste des plantes que les scarabées japonais adorent, ainsi qu'une liste des plantes que les scarabées japonais détestent. Il serait probablement déraisonnable de saccager votre aménagement pour n'y mettre que des plantes qu'ils détestent, mais si vous êtes pour ajouter ou changer des plantes de toute façon, aussi bien faire un choix informé. D'autre part, si vous subissez des dommages à un jardin de fruits et/ou légume, des filets à maille fine, disponible dans les centres horticoles, peuvent être une excellente solution.
Et finalement, il vaut mieux laisser le gazon devenir un peu plus long (10 à 15cm) pendant la période de ponte (aout). Ceci découragera les femelles d'y pondre et permettra de préserver l'humidité nécessaire au sol pour aider vos végétaux à surmonter leur défoliation par les scarabées, en plus des sécheresses qui sont typiques à ces moments de l'année.
Contrôle environnementale
Parlons ici de lumière extérieure et d'ambiance. Bien qu'une soirée illuminée de petite lumière dans un jardin bien aménagé et par une chaude soirée d'été soit un décor idéal pour se regrouper entre amis, les scarabées japonais partagent cette affection avec vous. Eux aussi profitent de ces occasions pour se regrouper entre amis de l'extérieur, sous la lumière de vos lampes d'ambiance, et coloniser vos végétaux. Nul notre intention de vous suggérer d'annuler vos évènements festifs ou de vous rencontrer en pleine noirceur, mais dans la mesure du possible, les lumières devraient être éteintes la nuit, surtout lorsqu'elles ne servent à personne, et tout particulièrement de la mi-juin à la fin aout. Vos voisins, la faune locale et même vos végétaux vous en remercieront. Effectivement, la pollution lumineuse est un réel problème pour la faune et la flore, et peut affecter négativement vos végétaux en les privant de leur cycle circadien. (laissez un commentaire si vous souhaitez que je publie un article à ce sujet).
Solutions dangereuses
Pièges à phéromones
Bien que ces pièges soient très efficaces pour attraper des scarabées japonais, il n'en diminue pas pour autant la population dans votre jardin. Le piège utilise des odeurs qui attirent l'insecte, mais il en attire généralement plus qu'il en attrape. D'installer ces pièges est donc une invitation aux colonies voisines de venir s'installer chez vous, là où les odeurs de phéromones sont bien présentes et le risque d'être attrapé est relativement mince. Autrement dit, il vaudrait peut-être mieux mettre ces pièges au bout de la rue plutôt que dans votre jardin.
Application d'eau savonneuse L'application d'eau savonneuse peut parfois être bénéfique, mais dans la plupart des cas, le jeu n'en vaut pas la chandelle. Plusieurs plantes, arbres et arbustes ne tolèrent pas l'application de savons. Sans parler que l'application serait souhaitable au moment où les scarabées sont le plus apparents (journée chaude et ensoleillée), mais que ces conditions sont aussi un moment où la plupart des végétaux ligneux vont fermer leurs stomates (pores sous les feuilles). Ceux-ci ferment leurs stomates pour éviter les échanges gazeux et ainsi conserver leur ressource en eau en attendant que les conditions météo soient moins arides. De vaporiser quoi que ce soit sur le feuillage dans ces conditions risque de fausser la perception des végétaux, causant l'ouverture des stomates et ainsi, la dessiccation du feuillage. Il vaut donc mieux éviter de mouiller les végétaux dans ces conditions, car les dommages potentiels pourraient outrepasser ceux des scarabées.
Traitement complet de gazon Bien que nous avons fait mention des traitements de gazon contre les larves, sous forme d'insecticide, il est important d'être prudent si vous faites faire ce traitement par une entreprise d'entretien de gazon. Plusieurs plans complets inclus aussi des traitements à l'herbicide tel que le Dicamba (connu sous plusieurs autres noms commercial). Ce genre de composés sont souvent phytotoxiques pour la plupart des végétaux du type dicotylédone (germination à deux feuilles). Ainsi, le gazon, une monocotylédone, en est épargné, alors que la plupart de vos arbres et arbustes en sont empoisonnés. D'ailleurs, ces mêmes produits sont parfois utilisés dans d'autres pays pour empoisonner les arbres et arbustes sous les réseaux électriques et ainsi prévenir de futures interférences. Bref, lors d'un plan de traitement, il vaut mieux être prudent et s'en tenir au nécessaire. Si les mauvaises herbes sont aussi un problème, leur retrait manuel devrait être priorisé bien avant d'avoir recours à des herbicides.
Le coup final Et puisqu'il y a fort à parier que vos voisins contribuent inconsciemment au problème, faites-leur subtilement part de vos nouvelles connaissances en la matière ou encore, partagez-leur cette publication. Lorsqu'il est question de mettre en place des mesures contre les scarabées japonais qui endommagent vos arbres, surtout lorsque l'on fait équipe avec ses voisins, la maxime d'Aristote est bien vraie... "La totalité est plus que la somme des parties". Merci à Isabelle L. P. de Gatineau, QC d’avoir fait appel à nos recommandations sur le sujet. C'est ce qui nous a incités à partager l'information dans cet article au bénéfice de tous. Si vous croyez qu'un autre sujet mériterait une place sur notre blogue, n'hésitez pas à nous en faire part dans les commentaires.
Vincent Gendron Rossignol
Propriétaire et Consultant
Intéressant